Undead Slayer [Cyrthana Wyrd]

Née au sein de la capitale du royaume par deux parents aimants et issue d’une famille relativement aisée, la petite Cyrthana n’avait jamais manquée de rien. Elle hérita du caractère doux et gentil de sa mère mais également du courage et du calme de son père. Certains diront qu’elle est née avec une cuillère d’argent dans la bouche, ce que la jeune fille aux cheveux blonds n’avait jamais caché. Cependant, la jeune fille ne s’était jamais laissée plonger dans l’arrogance et le mépris que certains membres de sa caste sociale pouvaient avoir envers ceux dont la vie avait été beaucoup moins bienveillante. En effet, la petite princesse, comme l’aimait l’appeler sa génitrice, s’était toujours contentée de ce que l’on lui donnait et ses caprices ne se voyaient vraiment que lorsqu’on la questionnait sur ce qu’elle voulait bien qu’on lui offre pour son anniversaire.

Cette innocence doublée d’un soupçon de naïveté dura jusqu’aux alentours de ses quinze ans, un véritable carrefour où elle quitta sa zone de confort. Jusque ici, Cyrthana ne s’était jamais préoccupée de ce qu’il se passait à l’extérieur du monde, se basant juste sur ce que ses parents voulaient bien lui raconter. Sa curiosité la poussa à rejoindre les rangs de la garde royale dès qu’elle fut en âge de le faire même si il ne s’agissait là que d’un prétexte pour explorer les horizons qui s’étendaient au-delà du royaume.

Prise entre les études des tactiques militaires et sa formation en tant que garde royal, Cyrthana vit son esprit se reforger au fil des entraînements et des missions. Elle devint plus entreprenante, plus ouverte et l’idéalisme qu’elle se faisait du monde s’effrita peu à peu. Bien que Cyrthana était très peu intéressée par les éventuels conflits géopolitiques avec leurs voisins, elle apprit, à ses dépends, ô combien ces conflits avaient engendré de morts par le passé. Elle comprit dès lors que l’avidité des êtres qui peuplaient cette nouvelle terre et leur soif de pouvoir était aussi bien présents au sein de sa propre nation que celle de l’ennemi. Tiraillée entre son envie de défendre sa patrie et son intention de vouloir sauver les gens peu importe leur bannière, Cyrthana était emplie de doutes, se demandant même si ces conflits moraux ne finiraient pas, tôt ou tard par entacher sa dévotion envers Heydell.

Ainsi, la jeune blonde apprit à n’utiliser ses capacités que lorsque cela s’avérait nécessaire, préférant d’abord régler les conflits dans la diplomatie plutôt que dans un bain de sang, ce qui faisait d’elle quelqu’un de relativement pacifiste et se refusait catégoriquement à verser le sang sans raison valable. De ce fait, la blonde détestait plus que tout les gens qui agissaient dans l’ombre tels que les assassins, traitant de couard quiconque ne savait pas faire face à un ennemi dans le respect et l’honneur.

Du haut de son mètre-septante cinq, Cyrthana était une femme dans la fleur de l’âge. Forte de son entraînement en tant que garde royal, la jeune femme de vingt-quatre ans possédait un corps svelte mais aux muscles raffermis par les nombreux efforts qu'elle fournissait pour l'entretenir. Ses atouts féminins ? Elle en possédait deux, parfaitement équilibrés, ni trop petits ni trop gros mais, à vrai dire, l'époque où la jeune femme se souciait encore de sa féminité lui paraissait bien lointaine, troquant les robes, parures et autres bijoux contre l’armure, le bouclier et l’épée.

Sa peau en porcelaine ainsi que son absence d'expression par moments du à sa carrière et aux  morts dont elle fut témoin lors de ses expéditions, pouvait suggérer que Cyrthana était une sorte de coquille vide mais cette impression s’estompait vite dès lors que l’on entamait une conversation. Elle possédait de longs cheveux dorés qui lui arrivaient jusqu’au bas du dos lorsque ceux-ci étaient complètement relâchés. En raison de son activité et parce qu’elle refusait catégoriquement de les raccourcir, la jeune blonde avait tendance à les ramener sur l’arrière de sa tête, notamment lorsque le port du casque s’avérait nécessaire. On pouvait en conclure que, malgré son caractère endurci acquis durant toutes ses années d’entrainement, Cyrthana mettait un point d’honneur à conserver un minimum de féminité.

Pour le reste, la soldate pouvait compter sur ses grands yeux cyans et son visage fin pour attirer le regard et capter l’attention de ses interlocuteurs même si cette dernière préférait largement rester discrète aux yeux du monde, rougissant de gêne lorsqu’on faisait ses éloges ou lorsque quelqu’un commentait sa bravoure ou sa loyauté. Côté vestimentaire, Cyrthana passait la plupart de son temps en armure lourde, trouvant son confort dans un style de combat qui alliait attaque et défense, comme pouvait le témoigner l’imposant bouclier tantôt dans son dos lorsqu’elle ne s’en servait pas mais que la soldate n’hésitait pas à brandir au cours de chaque combat.

Autoregénération

Ce pouvoir se manifeste lorsque Cyrthana se voit infliger des blessures. A l'instar de certaines créatures mythiques comme les loups-garous, le corps de Cyrthana possède des cellules capables de se multiplier et de se différencier pour régénérer n'importe quelle blessure pour autant que celle-ci ne soit pas fatale sur le coup (coeur transpercé par exemple). En pratique, le temps de régénération est proportionnel à la gravité de la blessure mais on estime qu'après vingt-quatre heures, toute plaie présente sur le corps de Cyrthana finit par disparaître. D'ailleurs, plus Cyrthana est fatiguée, plus elle a du mal à récupérer de ses blessures facilement, ce qui se remarque notamment lors des combats d'attrition.

Lævateinn

Lævateinn est une épée longue qui fut considérée pendant longtemps comme le trésor familial des Wyrd. Une tradition oblige les membres à passer cette épée de générations en générations dans l'espoir de trouver un héritier capable de dompter son pouvoir. En effet, le pouvoir de cette épée se manifeste passivement dès lors que l'utilisateur la manie. L'épée se charge alors de convertir sa vitalité en chaleur. En théorie, une personne lambda possède une énergie limitée qu'il peut allouer à l'épée et finit par mourir après que l'épée eut drainé la totalité de son énergie. Lævateinn fut alors considérée comme une épée maudite, jusqu'à ce qu'elle fut remise à Cyrthana. Combinée à son pouvoir de régénération, l'épée n'est alors plus bridée par la quantité d'énergie qu'elle peut puiser de son utilisateur et peut, si Cyrthana concentre une grande partie de son énergie dans son bras, s'entourer d'un voile de flammes capable de faire fondre le métal d'un simple toucher. Il en émane alors une chaleur extrême qui peut brûler n'importe qui se tenant à moins de 5 m de la jeune femme.  L’inconvénient de cette pratique est que Cyrthana ne peut plus bénéficier efficacement de son pouvoir de régénération lorsqu'elle manie Lævateinn à pleine puissance et se retrouve avec le bras brûlé à la fin de l'opération. Il faut alors en général quelques jours de repos avant de pouvoir réutiliser son pouvoir, ce qui oblige Cyrthana à ne l'utiliser qu'en dernier recours.

Au printemps de l’an 3994, les cris d’une jeune femme résonnaient à travers le domaine des Wyrd. Lady Julianna venait donner naissance à son premier enfant, une petite fille qui semblait en parfaite santé. Son père, le lord Valen, trahissait une émotion sur son visage qui suggérait qu’il s’attendait plutôt à un héritier mâle. Cependant, il ne lui fallut pas longtemps pour que son cœur de pierre s’adoucisse lorsqu’il eut le plaisir de prendre la petite fille dans ses bras et que cette dernière tira sur sa barbe en émettant un babillement qui ne manqua pas de le faire sourire. Depuis ce jour, le lord s’appliqua à donner la meilleure éducation à sa petite fille, l’entourant, lui et sa femme de tout l’amour qu’ils pouvaient lui donner. Grâce à ses anciennes relations avec les membres du conseil et son appartenance à la haute noblesse du royaume de Heydell, la petite Cyrthana puit bénéficier des meilleurs tuteurs et instructeurs que l’on puisse trouver au sein de la nation, le lord n’hésitant pas à mettre des sommes conséquentes pour l’avenir de sa fille.

C’est ainsi que l’enfance de la jeune blonde se passa sans qu’il n’y ait d’événement majeur qui la marqua particulièrement puisque Cyrthana était protégée de la réalité du monde, confortablement installée derrière les remparts de la capitale. Cependant, cette monotonie apparente finit par lasser la jeune fille qui, malgré ce que ses parents lui avaient appris, était désireuse d’explorer le monde au-delà des frontières du royaume. Etant fille unique, ses géniteurs ne l’avaient jamais vraiment quitté des yeux, s’inquiétant à chaque fois que la jeune princesse rentrait trop tardivement à leur goût. Peu après son quinzième anniversaire, Cyrthana fit l’annonce à ses parents de vouloir rejoindre la garde royale et exposa son désir d’aventure. Bien que réticents à lui accorder cette liberté au début, son père finit par céder après s’être assuré que cela n’était pas juste dû à une lubie passagère. Le lord joua de ses relations pour que sa fille puisse recevoir une formation de qualité et, après avoir réglé les modalités de son engagement au sein de la garde, lui et sa femme ne la revirent plus pendant plus de cinq ans.

C’est sans doute lors de cette période que s’opéra le plus grand changement chez Cyrthana. Au sein des casernes, elle n’était rien de plus qu’un soldat qui devait faire ses preuves. Son nom ainsi que son rang ne l’aideraient en rien à pouvoir atteindre son objectif et elle ne dut contenter que sur sa détermination pour se hisser au sommet. Outre les changements physiques qui s’opéraient naturellement à cet âge-là, Cyrthana dut se forger un mental d’acier pour supporter les entrainements qu’on lui faisait subir. C’est d’ailleurs, lors d’un de ses nombreux échanges avec ses camarades d’armes que Cyrthana appris un fait assez intéressant sur son corps. Alors que nombre des soldats devaient panser les blessures qu’ils recevaient au cours de leur formation, la jeune femme n’avait jamais vraiment eu besoin d’appliquer un quelconque soin sur ces dernières. En effet, à chaque fois qu’on lui infligeait une blessure et que la jeune blonde se disait qu’elle soignerait cela en fin de journée, elle constatait avec stupeur que la plaie se refermait d’elle-même. Cyrthana testa ses théories en s’infligeant elle-même des blessures avant de constater que son corps avait été doté de formidables capacités de régénération. La jeune blonde n’en avait jamais vraiment testé les limites de peur de s’infliger des blessures que son don ne pouvait soigner. Grâce à cette bénédiction des cieux, la jeune Cyrthana gravit les échelons un par un et acquis un certain nom au sein de la petite communauté qui l’avait vu évoluer.

Cinq années plus tard, Cyrthana acheva sa formation militaire et regagna le domaine familial. Elle pouvait désormais quitter officiellement le royaume et porter fièrement les couleurs de sa nation. La jeune blonde se rappela que lors son retour, durant la nuit suivant son adoubement en tant que chevalier de la reine, son père organisa un banquet à son honneur dont les festivités durèrent jusqu’au petit matin. Avant que la jeune fille n’eut le temps de regagner sa chambre, son père la retint par le poignet en faisant signe de le suivre. La raison ne lui fut pas communiquée et son paternel resta très évasif sur ce qu’il voulait lui montrer. Cyrthana suivit lord Valen à travers les souterrains du complexe familial jusqu’à un petit vestibule dans lequel était entreposé des objets en tout genre. Sans un mot, le lord entra dans la pièce et se dirigea vers un socle dans lequel était entreposé une épée dans son fourreau. Il en détacha puis retourna auprès de sa fille et la lui tendit. La première sensation que Cyrthana ressentit en s’emparant de l’arme était une douce chaleur qui émanait de celle-ci. Pourtant, la jeune femme aurait juré que le domaine familial ne possédait aucun système de chauffage dans ses souterrains.

« J’ai longtemps hésité à te la remettre, commença-t-il, mais je me dois de respecter la tradition. Cette épée est le trésor familial qui se transmet de génération en génération depuis bientôt plus d’un millénaire. La légende raconterait que sa lame fut plongée dans les volcans de l’Ile des Cendres et que, depuis, il en dégage une chaleur rémanente. Pourtant, cette agréable chaleur n’en est pas moins une calamité pour tous les porteurs qui ont manié l’épée jusqu’à maintenant. Dès lors qu’on la porte, celle-ci se mettra à drainer la vitalité de son manieur jusqu’à ce que mort s’en suive. Evidemment, il est possible de s’en affranchir en décidant de s’en écarter. »

Cyrthana resta perplexe face à cette affirmation. Pourquoi sa famille aurait-elle gardé un artéfact maudit pendant plusieurs générations et surtout pourquoi son père ne se décidait-il à ne lui en parler que maintenant ?

« Si cette épée est aussi dangereuse que tu le prétends alors pourquoi je devrais la garder ? »

Le lord esquissa un sourire avant de continuer :

« Ce n’est qu’une simple tradition. Les Anciens affirmaient qu’un jour viendrait où quelqu’un serait en mesure d’exploiter le potentiel de Lævateinn mais, personnellement, je n’y crois pas vraiment. De toute manière, dans moins d’une semaine, tu feras comme tous tes prédécesseurs et tu viendras reposer l’épée sur son socle jusqu’à ce que la coutume ne se répète… »

Durant les années qui suivirent, Cyrthana laissa libre cours à sa curiosité, commençant par arpenter les terres adjacentes au royaume mais s’écartant de plus en plus loin, s’enfonçant davantage dans les terres sauvages. Contrairement à ce que son père lui avait dit, la jeune blonde ne ressentit pas de changements lorsqu’elle maniait Lævateinn si ce n’est la légère chaleur qui s’en dégageait. Au fil de ses aventures, Cyrthana en trouva même des utilisations pratiques puisque celle-ci avait au moins le mérite de la réchauffer lorsqu’elle devait établir des campements à la belle étoile. Le véritable pouvoir de Lævateinn ne se manifesta que bien plus tard lorsqu’elle fut sollicitée pour une mission dans les contrées du nord.
Un jour de l’hiver 4018, alors que la jeune femme était âgée de vingt-quatre ans, un ordre d’expédition lui parvint. Celui-ci stipulait que Cyrthana devait explorer les contrées des neiges éternelles afin d’y trouver une plante rare. Un bref descriptif de celle-ci l’informait que la plante poussait en hiver dans les contrées montagneuses. La dangerosité du milieu couplé au fait que peu de personnes osaient s’y aventurer, laissait imaginer que le Lumen du soir pouvait être retrouvé là-bas. La copieuse récompense qui y était adjointe était un bon indicateur du risque de la mission mais pour Cyrthana, c’était davantage la curiosité que l’appât du gain qui l’avait poussée à accepter cette mission. La jeune femme mena donc son escouade jusqu’aux contrées du nord, et composée que d’une demi-douzaine de personnes. En effet, la jeune blonde avait pensé réduire leur effectif au minimum afin d’éviter de perdre du temps lors des temps de halte. Avec aussi peu de personnes, il était facile de lever le camp et de se mobiliser rapidement à la moindre menace.

« Après tout, le but n’est pas de mener une armée mais seulement de cueillir quelques fleurs, n’est-ce pas ? »

La jeune capitaine essaya de se rassurer comme elle pouvait dans ses contrées hostiles dont le plus grand danger était sans doute le froid qui s’immisçait par le moindre interstice de son armure. Le petit groupe avançait lentement, gravissant peu à peu la chaine de montagne qui s’étendant devant eux, guettant l’apparition de l’objet de leur mission. Alors qu’ils s’aventuraient dans un canyon dans l’espoir d’échapper aux vents boréaux, la jeune blonde entendit un cri provenant de derrière elle, suivi d’un râle d’agonie. Faisant volte-face pour s’enquérir de la situation, Cyrthana constata avec effroi la poitrine de l’un de ses camarades traversée de part en part par une épée de glace. Profitant de la stupeur du groupe, l’assassin se rua vers sa prochaine victime, prêt à lui faire subir le même sort. Se saisissant de son bouclier, la jeune femme bouscula son camarade d’arme et se prit la charge de son assaillant de plein fouet. Il était fort…très fort mais surtout, il n’était pas humain…

Dans les mythes les plus anciens, l’on racontait que certains aventuriers ayant perdus la vie se sont vus accorder une seconde vie en échange d’une soumission totale à ceux qui les avaient réanimés. Cependant, les siècles passant, ces derniers avaient fini par s’affranchir de leur servitude et continuaient maintenant d’errer dans les contrées glaciales du nord à la recherche de nouvelles victimes. La jeune blonde, déjà fatiguée par la traversée ne pouvait sauver ses compagnons et, aider du froid mordant des neiges éternelles, la créature de glace n’eut qu’à attendre que le froid eut fini de saper les forces de ses proies avant de venir les cueillir doucement. C’est peut-être à ce moment-là, lorsqu’elle vit ses frères d’armes tomber un à un, que la jeune capitaine comprit la fragilité de êtres humains. Même si elle décidait de fuir maintenant, la jeune femme n’aurait certainement aucune chance de lui échapper et ne ferait que s’épuiser davantage dans sa course. Cependant, malgré la peur qu’elle ressentait, la jeune femme refusait de baisser les bras. C’est alors qu’elle se souvint d’une phrase que l’un de ses instructeurs lui confia à la fin de d’une de ses séances d’entrainement.

« Nous sommes certainement les formes de vies intelligentes les plus anciennes ayant foulé cette Terre…Les Humains nés en ce monde…ne peuvent mourir sans raison…Car notre cœur, désirant une raison de vivre…ne nous le permet pas. »

Elle dégaina son épée puis la pointa vers son adversaire d’un regard déterminé.

« Je ne survivrais peut-être pas à ce combat mais je jure sur mon honneur que je t’emporterais dans avec moi. »

Les deux lames s’entrechoquèrent et il s’en suivit un combat d’attrition. Le revenant de givre ne semblait pas posséder des capacités surnaturelles mais il n’en restait pas moins un fier combattant. Dans d’autres circonstances, Cyrthana aurait peut-être eu une chance de l’emporter mais elle jouait sur son territoire et dans ses contrées glacées, son adversaire avait clairement le dessus. Au début, la jeune femme était capable de soigner n’importe quelle blessure que l’Einherjar lui infligeait mais plus le combat s’éternisait et plus ses capacités régénérantes perdaient en efficacité. Ses mouvements devenaient plus hasardeux et la jeune blonde n’était plus que sur la défensive, essayant tant bien que mal d’éviter que son adversaire ne sépara sa tête du reste de son corps. Une dernière charge et les deux adversaires finissaient le combat au sol, l’Einherjar tentant désespérément d’enfoncer son épée dans la poitrine de la jeune femme tendit que la sienne s’efforçait à repousser la lame du revenant de givre. Presque inconsciemment, Cyrthana dirigea ses dernières forces vers son bras droit, qui, si il cédait, ouvrirait la voie vers son cœur (et ce n’est pas qu’une métaphore !).

Alors qu’elle sentait ses dernières forces l’abandonner, la jeune femme sentit sa main brûler et ce qui, à priori, devait être apparenté à une morsure du froid, avait en réalité une explication tout autre. La douce chaleur bienveillante que dégageait normalement son épée et que Cyrthana avait à peine ressentie au cours de l’affrontement en raison des conditions climatiques extrêmes, s’était transformée en une fournaise accablante qui fit fondre la neige environnante. La lame s’entoura d’un voile de flammes qui fit fondre le métal qui entourait son gantelet et l’épée de glace que tenait son assaillant finit par se vaporiser tellement la chaleur devait être insoutenable. Etrangement, mis à part la main qui tenait la lame, le reste du corps de la jeune blonde ne semblait souffrir d’aucune brûlure. Face à cette incompréhension, son adversaire recula de sa victime alors que certaines flammes étaient encore en train lécher son corps de glace. Si l’Einherjar pouvait encore exprimer des émotions alors ce serait certainement une expression de peur qui se dépeignerait sur son visage. Profitant de ce dernier atout et puisant dans ses dernières forces, Cyrthana terrassa son adversaire d’une coupe verticale qui n’eut aucun mal à traverser la carapace de glace dont était doté le revenant de givre.

« J’ai réussi… »

Ce furent les derniers mots de la jeune femme avant qu’elle ne s’écroulât. La jeune blonde se réveilla bien des jours plus tard, dans une petite chaumière. Elle était recouverte de bandages mais l’absence de sang sur ceux témoignaient que le don de la jeune femme avait fait le travail sans qu’aucune intervention extérieure n’eut été nécessaire. Cyrthana n’eut pas à attendre longtemps avant que son sauveur ne vienne se présenter à elle. C’était un homme d’une trentaine d’années dont le corps était tout aussi couvert de bandages que le sien. Seule différence, les siens étaient tâchés de rouge. Il lui apporta un bol fumant dont l’odeur suffisait à lui ouvrir l’appétit.

« Tu es enfin réveillée…Cela fait cinq jours maintenant… »

Revenant peu à peu à elle, Cyrthana remarqua qu’on avait pris le soin de la déposséder de son armure…et de ce qu’il y avait en dessous. Instinctivement, la jeune femme tira les draps vers elle, frustrée à l’idée qu’un homme avait touché son corps. Devant cette réaction plus qu’enfantine, l’homme esquissa un sourire avant de la rassura.

« Calme-toi jeune pucelle, ce n’est pas ce que tu penses et puis j’en ai déjà eu assez avec les effarouchées du nord…Bref, je t’ai trouvé dans les montagnes au milieu d’autres corps et d’un cadavre tranché en deux. La neige autour de ton point de chute avait entièrement fondue et ton bras droit était dans un sale état. J’ai fait de mon mieux pour te remettre sur pied mais visiblement, tu n’en as pas eu besoin. »

En gage de bonne foi, il se saisit de la cuillère et en avala une gorgée avant de la tendre vers la jeune femme, comme si il voulait prouver son innocence. Encore méfiante, Cyrthana se saisit du bol et, après quelques gorgées, finit par engloutir l’entièreté du récipient avant de le tendre vers son sauveur.

« Je vous remercie de m’avoir sauvé. J’ai toujours eu une solide constitution mais sans doute que je serais morte de froid si vous ne m’aviez pas trouvé. Je suis venu en expédition pour chercher des Lumen du soir. Apparemment, celles-ci auraient des vertus thérapeutiques et une personne en aurait besoin en ce moment. Je parcourais les montagnes avec mes camarades et puis cette chose nous est tombé dessus… »

L’homme resta perplexe. Il ne doutait pas une seule seconde de la bonne foi de la jeune femme mais il ne pouvait croire qu’elle avait réussi à tuer un Einherjar à elle seule, sans compter que celui-ci avait été carbonisé en de nombreux endroits. Seul fait marquant était que lorsqu’il transporta son épée, celle-ci était encore chaude comme si le métal avait été exposé à une source de chaleur, à la différence que, cette fois-ci, la chaleur ne semblait pas s’estomper avec le temps.

« Hum…dis-moi, comment est-ce que tu es parvenue à vaincre l’Einherjar ? Sur leur territoire, ce genre de créatures est quasiment impossible à tuer même pour les plus aguerris. »

Cyrthana essaya tant bien que mal de reconstituer son affrontement avec la créature de givre. Dans les derniers instants du combat, elle se souvint avoir « diriger » son énergie vers son bras et que celle-ci s’était transmise à son épée qui s’était soudainement embrasée.

« Je ne saurais pas trop l’expliquer mais mon épée s’est entourée d’un voile de flammes quand je me suis mise à repousser l’Einherjar de toutes mes forces. » Avoua-t-elle

Un soupçon d’intérêt s’éveilla chez le jeune homme. Il possédait une théorie mais sa vérification nécessitait la coopération de la jeune femme. Il se leva un instant avant de chercher l’artefact puis le tendit à la jeune femme.

« Essaie de concentrer toutes tes forces dans le bras qui tient ton épée. »

Cyrthana ne comprit pas où son interlocuteur voulait en venir mais elle s’exécuta sans protester. Quelques secondes plus tard, la lame de l’épée s’échauda et un maigre voile de flammes entoura Lævateinn. C’était bien loin de l’intensité de feu que la jeune flamme avait déployé contre l’Einherjar mais cette expérience avait au moins le mérite d’expliquer le phénomène.

« Hum…je pense comprendre. Ton épée convertit l’énergie vitale que tu lui envoies en chaleur et l’intensité dépend de la quantité d’énergie que tu es prête à déployer. Ce n’est qu’une hypothèse mais je pense que ton « don » de régénération est directement corrélé à l’intensité de flammes que tu peux produire.
Autrement dit, dans les mains d’un autre, l’épée consumerait simplement sa vitalité jusqu’à ce que mort s’en suive mais puisque ton corps possède des capacités autorégénérantes induites, peux être en mesure d’utiliser les pouvoirs de ton épée sans en subir la malédiction. »

Cyrthana ne tarda pas à faire le lien avec ce que son père lui avait annoncé son père quelques années auparavant. Était-ce là le véritable pouvoir de Lævateinn ? Si oui, pouvait-elle réellement le contrôler sans semer le chaos et la destruction autour d’elle ? En tout cas, Cyrthana avait beau tourner le problème dans tous les sens, il n’en restait pas moins que si elle n’avait pas pris cette épée avec elle ce jour, elle aurait certainement fini comme ses compagnons. La jeune femme prit ensuite quelques jours pour se reposer et en profita pour faire connaissance avec son interlocuteur. Elle apprit que celui-ci avait participé à une sorte de rite de passage associé aux Valkyries au Lac Gelé, ce qui expliquait les nombreuses blessures présentes sur le cœur de l’homme. Celui-ci prit le soin d’omettre les détails pour éviter de gêner son interlocutrice mais Cyrthana eut suffisamment d’éléments de réponses pour comprendre que les Valkyries utilisaient ce biais pour agrandir leur communauté. Lorsqu’elle fut suffisamment rétablie, la jeune femme prit congé de son hôte et décida de reprendre la route vers la capitale.

« Tu me quittes déjà ? » Dit-il avec une pointe d’amusement.

« Oui, Jowgen, il faut que je retrouve les miens. Cela fait près d’un mois que je n’ai plus donné signe de vie. » Répondit-elle en soupirant.

Jowgen fouilla dans son armoire et en sortit une petite sacoche qu’il remit à la jeune femme. Curieuse, Cyrthana en examina le contenu, ne pouvant retenir un cri de joie.

« Des Lumen du soir ! Mais comment ?! »

« Cela fait près de quinze ans que j’arpente les contrées du nord, depuis le temps, j’en ai amassé un sacré paquet. Ils sont pour toi. Cela serait bien dommage de revenir les mains vides, tu ne penses pas ? »

Cyrthana se confondit en remerciements devant son interlocuteur et après une accolade chaleureuse, la jeune femme reprit la route vers l’est. Une fois sortie des contrées du nord, le voyage devint plus facile car elle ne devait plus lutter contre le froid mordant. Sur la route, la jeune blonde s’efforça à maitriser sa nouvelle découverte, testant les limites de son intensité et la durée de sa capacité. De retour à la capitale, Cyrthana fut acclamée, la plupart des gens s’étant déjà résolu à sa mort. Sa mission était un succès mais elle avait perdu bien trop de camarades dans cette expédition et demanda que l’on accorde une cérémonie à ces soldats tombés au combat. La jeune blonde se chargea elle-même de s’exprimer aux familles des défunts et auxquelles elle présenta les plus sincères excuses. Néanmoins, sa trouvaille avait permis de soigner de nombreuses personnes dont le pronostic vital était engagé et Cyrthana s’était gardée d’annoncer qu’elle avait levé le voile sur le pouvoir de Lævateinn, préférant ne pas diriger l’attention vers elle plus que de raison. Il n’en restait pas moins que, depuis ce jour, la jeune femme se jura de s’entrainer pour que pareille tragédie ne se reproduise plus jamais.